Chapitre débuté par Lucien
Chapitre concerne : Lucien,
Lucien, le gusse à la langue bien pendue, se prenait pour un cow-boy solitaire, le cul posé dans ce désert sans fin avec ce putain de sable qui s’incrustait partout dans les fringues quand il n’en avait pas plein la tronche, et putain que ça grattait autant que des morpions qui danseraient la java dans son slip !
Assis là, entouré de dunes prêtes à l'engloutir sous un ciel criblé d'étoiles, ça lui rappelait le bon vieux temps où il en chiait rien que pour se dégotter un taf. Son vieux, avec sa tête de bouledogue et sa gouaille à l'ancienne, lui avait gentiment fait comprendre que c'était l'heure de lever les voiles en lui claquant la porte au nez.
Les souvenirs lui chatouillent le ciboulot, c’est qu’y deviendrait presque nostalgique avec le manque de pinard, le Lulu ! Se pavanant comme un paon fringuant à un bal costumé de flamants roses jusqu’à l’ANPE, tout jeune et sûr de lui qu’il était, le lascar s’est quand même retrouvé à pointer dans un entrepôt comme magasinier, trimballant ses foutues caisses et cartons sur son tire pal.
Les boss ? Des clowns se la jouant grands patrons en n’ayant pas plus de charisme qu'une carotte. Et au carnaval du capitalisme, mieux valait des relations intéressantes avec les cafards qu'avec ces tocards. Ses seuls plaisirs à venir bosser ? Se taper Sophie, l’assistante du patron et faire tomber quelques marchandises du camion.
Une chose en entraînant une autre, il a vite fini en taule en plus de s’être niqué le dos. Mais attendez, le comble dans tout ça ? Une chtouille carabinée comme bouquet final !
Lune I - Capsule temporelle.
Le baroudeur à la tronche poilue se retrouve, comme tout à chacun au moins une fois dans sa vie, un jour paumé dans ce désert interminable. Faut dire que sans boussole, ça lui arrive souvent. Des dunes à perte de vue, le soleil qui écrase comme un marteau-piqueur, bref, le décor parfait pour une aventure à la Indiana Jones, ou un Lawrence d’Arabie sans sa chèche (mais avec sa capuche, évidemment.).
Un pas en entraînant un autre, un pied mal placé, et BIM le voilà qui se vautre comme un sac. Son regard affûté s'abaisse vers le sol, plus par nécessité que par choix. Et là, entre deux dunes poussiéreuses, il distingue une forme étrange. Ça brille sous le soleil cuisant, comme un appel à la curiosité.
“Si c'est un baril de merde nucléaire, l’lulu est foutu !” que marmonne notre bonhomme, ébouriffant sa barbe d’un air circonspect. Il s'agenouille et commence malgré tout à dégager le sable de cette relique cachée. Ses doigts burinés par le soleil fouillent, dévoilant peu à peu un contour métallique. Le suspense s'épaissit dans l'air brûlant. Et voilà que, tel un archéologue de l'absurde, Lucien déterre un boîtier mystérieux avec des motifs érodés par le temps et des symboles indéchiffrables. Ça claque comme une trouvaille sortie tout droit d'une autre époque. Ouais, comme dans Retour vers le Futur, mais en moins glamour, et surtout sans Delorean.
Toute la magie de la découverte s'emballe dans l'esprit de Lucien. L'excitation de l'inconnu, de l'inexploré, le prend aux tripes. C'est comme si ce bout de métal enfoui dans le sable l’avait attendu lui et pas un autre pour être délivré !
Il tatonne pour ouvrir ce foutu engin comme un gamin déballant ses cadeaux à Noël. Il s’y reprend d'ailleurs à plusieurs reprises en maugréant “Bordel, manquerait plus qu'un génie sorte de là-dedans !”, puis tire dessus, et là miracle, ça s'ouvre comme une boîte de pandore dégueulant son contenu hétéroclite.
À l'intérieur ? Des fringues à la con qui ressemblent à du vintage, genre les années où les gens pensaient que le fluo c'était le top du style. Lucien, il se marre en les sortant, "Putain, c'était la mode ça ?". Il trouve aussi un vieux walkman, genre le machin antédiluvien qui crachait de la musique avec des cassettes que fallait souvent rembobiner avec un bic. D’ailleurs, il en fout une dedans pour voir si l’appareil fonctionne encore, et là c'est la révélation.
Des vieux riffs de rock' qui arrachent la gueule, des paroles qui sentent la rébellion et la sueur des années 80/90. Lucien se retrouve à headbanguer comme un con au beau milieu du désert, avec son nouvel attirail fluo et son walkman vintage. Ça lui fout une putain de nostalgie, même s'il ne se souvient pas trop de cette époque.
Evidemment, des playlists franchouillardes bien moins cool, mais notre lulu se sent déjà comme un pape heureux au milieu de tout ce fatras.
Il trouve aussi des Polaroids avec des gueules d’ado dessus. Ça l'inspire, Lucien. Il se serait bien pris en photo avec la casquette à l'envers, en mode bad boy du désert sauf qu’evidemment, il n’en a pas lui de casquette...
Au milieu des fringues fluorescentes, des gadgets d'une autre époque, des lettres, dessins, bracelets d'amitié, et tout un tas de bricoles : le lascar tombe sur une pile de bouquins. Il se saisit du premier livre, ses doigts caressant le dos de l'ouvrage. Un sourire en coin se dessine sur son visage tandis qu'il prend conscience de l'univers qui s'ouvre à lui.
"L'Alchimiste"...
Au lieu de se plonger dans les mots, le baroudeur fronce les sourcils. Les pages entre ses doigts burinés ne suscitent qu'un haussement d'épaules sarcastique. Les phrases semblent glisser sur lui comme de l'eau sur les plumes d'un canard.
"Qu'est-ce que c'est que ces philosophies à deux balles?" qu'il baragouine, secouant la tête avec une moue dépitée. Les prétendues réflexions profondes sur le destin et les rêves lui arrachent un rire moqueur. Lucien n'est pas dupe. Pour lui, c'est comme si l'auteur avait pris un dictionnaire de citations inspirantes, les avait mélangées dans un chapeau, et en avait sorti une au pif.
Le verdict tombe sans appel. Lucien, nonchalant, déchire une page de l'ouvrage et la scrute un instant, comme s'il venait de trouver le parfait substitut au papier toilette. Puis, avec une satisfaction ironique, il utilise comme prévu cette page comme un vulgaire morceau de PQ, déclarant avec un sourire en coin : "C'est ça, la vraie alchimie, mon pote."
Les autres pages bientôt réduites au même sort ou à finir en cendres dans son feu de camp, emporteront avec elles les prétentions philosophiques qu'elles contenaient. Lucien, lui, se déleste enfin de son déguisement, ne gardant que l'utile et l'agréable pour continuer son périple sans se charger du poids superficiel des mots évaporés dans la nuit.