Pensées d'un escroc en exil

Chapitre débuté par Le Bouffon

Chapitre concerne : Le Bouffon,

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Lune 4

Les cul-bénis du Conseil de l’Abri m’avait voué aux gémonies, condamné à l’exil. Un châtiment bien pire que la pendaison, la suffocation serait beaucoup plus lente mais le résultat identique...une mort certaine.
Je n’ai d’ailleurs pas prévu d’éluder le sujet...non, non, bande de demeurés, un escroc n’est pas fait pour survivre seul dans le sable et il était hors de question que je me mêle à une populace organisée. J’en ai assez chié de la Société humaine, allez vous faire foutre, vous pisserez sur mes os blanchis.
Surtout accoutré comme je l’étais.

Le surveillant de la porte vers l’exil me regardait en pouffant. Ouais, ducon, les Sages ont rien trouvé de mieux que de me refiler l’attirail de ma dernière escroquerie urbaine. Sapé comme jamais. J’étais un grand falsificateur dans c’te vie, je crèverais comme un Bouffon...des vivres pour trois lunes, une radio, un journal et un crayon...ça me laisserait le temps de réfléchir, d’exprimer et d’écrire mes regrets avant de mourir selon le Juge. Touche toi la nouille, je mangerais jamais à votre table les tanches.
Comment ça la raison de ma sortie et mon nom, ducon ? Tu dois compléter le registre des sorties ? Exil définitif...Le Bouffon…

T’as pas un magazine avec des donzelles dénudées qui traîne dans ton bureau mon gars ? Que je puisse au moins me pignoler une dernière fois avant de perdre mes couilles…putain de masturbateur égoïste, va chier...ouais, je sais que je vais crever, je te pisse au cul, Le Bouffon t’emmerde raclure.



Que des bons à rien à l’horizon. Putain, je vais faire comment pour me fendre la poire avec le ramassis de débiles qui gravitent dans ce secteur. Du sable à perte de vue. Deux blaireaux et un connard qui rôdent autour d’un bunker mais pas un pour ouvrir le bunker ou ouvrir sa gueule. Deux ou trois baveurs...et une gamine.



Hé Lapine, ça te dirait qu’on fasse équipe pour botter le cul des blaireaux qui zonent ici. Me fallait une coéquipière pour trouver un moyen de me marrer avant d’y passer. Ouais, je tourne pas autour du pot, j’ai besoin de toi pour buter des connards, histoire de survivre un peu plus longtemps, n’y vois rien de personnel ma grande. C’est vrai que je suis un peu misanthrope mais ça, je le garde pour moi.

Charline !
Y a pas de lapine avec moi. Je veux pas tuer des gens moi, je veux en retrouver.
Et retrouver mon chat aussi ! Tu as vu mon chat monsieur ?


Bordel, c'est ma veine, rien à en tirer. Et trop jeune pour la tirer. Qu'est-ce que j'en ai à foutre de ton chat, morveuse.

Nan, j'ai pas vu de chat Couquine...mais si je tombe dessus, je le vide de ses viscères et je le remplis de paille. Comme ça, il pourra plus jamais s'échapper le méchant chat et tu pourras le garder avec toi pour toujours...

Alors... Merci Monsieur Bouffon ! L'idée elle est bonne.
Tu me rappelles si tu trouves mon chat ?


Ca commence bien c't'exil...un Bouffon, ouais un putain de Bouffon. Même une morveuse me prend pas au sérieux. Il perd rien pour attendre ton matou. Si je lui tombe dessus, je le fornique, lui casse le cou et le remplit de sable. Pas de paille ma grande, faudra m'excuser, on fait avec les moyens du bord.
 

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Lune 22     Les mains de Mona

Le Bouffon ruminait dans son coin alors que le soleil plongeait dans la carrière de sel à l’ouest du Bazar...le tas de sel où hurlait l’Homme des étoiles et ses comparses cosmiques.
Il s’estimait heureux et chanceux ces derniers temps. Il avait survécu à l’attaque du mâle alpha de la meute et de son simiesque acolyte, il avait fait ripaille commune avec les Marchands de sel et d’esclaves et maintenant, la voleuse aux mains agiles campait à portée de sa chaîne de vélo en dehors de toute logique.
Il avait une certaine admiration pour cette Mona. Elle avait réussi des tours de passe-passe qui rendraient jaloux bien des margoulins de rue. Elle était aussi rapide et couillue que les tire-laines de l’ancien métro. Pour un escroc comme le Bouffon, elle aurait été une parfaite équipière dans une autre vie.

Mais cette chienne de vie l’avait condamné au Désert où l’attendait l’inévitable Sentence. Ce désert lui avait donné un compagnon d’infortune, la Gerboise, sortie d’un trou pour venir renifler ses escarpins de Bouffon. Le rongeur était devenu son fidèle compagnon, lui témoignant une affection surprenante. Le Bouffon n’était pas homme à se lier mais il espérait que la Gerboise lui survivrait. Il lui avait même donné comme mission de livrer un de ses grelots à Sieur Wes de la Compagnie à sa mort sans savoir si l’animal était capable d’une telle prouesse.

L’escroc pensait que l’Homme des étoiles était l’Exécuteur envoyé pour accomplir la Sentence. Mais il avait survécu avec une vilaine balafre au visage, hébété, ahuri, laissant la Gerboise lui lécher le sang dégoulinant de son front. C’est l’instant qu’avait choisi l’habile Mona pour s’emparer du rongeur et s’échapper à toutes jambes.
Le Bouffon pensait qu’il ne la reverrait plus. Il s’était rendu au nouveau Bazar de Farid, avait bu le thé pour récupérer et était parti ripaillé avec le diplomate Michel et le punk Jeff au niveau du Passage vers le Nord.
Et Mona avait encore frappé avec ses mains agiles...elle s’était rendu au Souk, avait zieuté les étals et volé au turban et à la barbe de Farid une poignée de sel. Puis elle était partie planter son campement à deux pas du Bazar.
Le fringant et volubile Michel avait promis au Bouffon qu’ils l’éxécuteraient tous les deux à la tombée de la nuit. A lui, le soin de mettre la Gerboise à l’abri et au Bouffon, le plaisir de briser les os des mains de la voleuse avant de lu faire avaler ses dents.

Mona n’eut pas le temps d’éviter le duo. Le Bouffon se jeta sur elle et l’a plaqua contre lui à l’aide de sa chaîne de vélo, Michel en profita pour lui abattre sa masse sur la tempe, la laissant inanimée dans les bras du Bouffon.
Pendant que l’Anarchiste fouillait les bagages de Mona et récupérait la Gerboise, Le Bouffon acheva la voleuse. Il l’a jeta au sol puis avec un rictus de Bouffon hilare se mit à sauter pieds joints sur la cage thoracique de sa victime expiatoire.

Ahahahahaha, je fais du trampoline Mich’, mate moi ça…

Les côtes cassées de Mona émettaient un bruit écoueurant à chaque sursaut du Bouffon. Du sang jaillissait de sa bouche morte d’où ne sortirait plus aucun souffle de vie.
Le Bouffon arrêta ses pirouettes lorsque Michel ouvrit ses mains pour découvrir la Gerboise...le vil amuseur de galerie laissa perler une larme sur sa joue en apercevant le rongeur qui sauta prestement sur l’épaule de son fidèle ami.
Celui-ci en oublia de casser les doigts de la voleuse un par un comme il se l’était imaginé. Les habiles doigts, intacts, reposaient inertes dans le sable lorsque le duo repartit vers le Bazar...